Dans un monde où l’économie fonctionne en continu et où la digitalisation bouleverse les modes de travail traditionnels, il est devenu essentiel de repenser l’organisation du travail en alliant souplesse et efficacité. L’accord de coalition vise ainsi à répondre aux défis économiques actuels tout en assurant un équilibre entre les exigences des entreprises et les droits des travailleurs.
En matière de relations de travail, l’accord s’articule autour de deux axes majeurs : la flexibilisation du cadre contractuel et la simplification des dispositifs existants.
Remaniement du cadre contractuel
L’accord de coalition propose des dispositifs visant à simplifier aussi bien l’entrée que la sortie d’une relation de travail, en instaurant des mécanismes plus souples.
Rétablissement des périodes d’essai
Tout d’abord, la période d’essai, supprimée depuis le 1er janvier 2014 pour la plupart des travailleurs à l’exception des intérimaires et des étudiants, sera réintroduite au plus tard le 31 décembre 2025. Ainsi, les nouveaux contrats de travail pourront inclure une clause permettant une rupture moyennant un préavis de seulement une semaine – réduisant ainsi significativement le préavis actuellement fixé à six semaines pour un travailleur ayant une ancienneté de six mois.
Nouvelles dispositions sur les indemnités de rupture en cas de licenciement
Ensuite, à l’instar du plafonnement de l’indemnité compensatoire de préavis à 13 semaines en cas de démission du travailleur, un mécanisme similaire sera instauré pour l’employeur en cas d’un licenciement. Ainsi, pour tous les contrats conclus après l’entrée en vigueur de cette prochaine réforme, les indemnités compensatoires de préavis seront plafonnées à 52 semaines, empêchant toute progression de l’indemnité au-delà de 16 à 17 ans d’ancienneté. Il restera toutefois possible de déroger à ce plafond au niveau de l’entreprise. En revanche, les contrats en cours continueront de se voir appliquer le système actuel, dans lequel la durée du préavis est calculée en fonction de l’ancienneté et sans plafond.
Par ailleurs, une réduction du nombre d’indemnités spéciales obtenues dans le cadre d’un licenciement, notamment l’indemnité de protection, est également envisagée. Dans cette optique, la durée de protection contre le licenciement des candidats non élus aux élections sociales sera ramenée à six mois après l’affichage des résultats, alors qu’elle s’étend actuellement à près de quatre ans, ou à deux ans pour les candidats non élus à deux élections consécutives. Toutefois, les membres du personnel élus conserveront leur protection contre le licenciement dans les mêmes conditions qu’actuellement, soit jusqu’à l’installation des candidats élus lors du scrutin suivant.
Suppression progressive du régime de chômage avec complément d’entreprise (RCC)
L’accord de coalition prévoit également de renforcer l’activation et la réintégration des travailleurs sur le marché de l’emploi. Partant, les dispositifs de départ anticipé, notamment le RCC (anciennes « prépensions ») seront supprimés. À compter du 31 janvier 2025, le RCC ne sera plus accessible aux nouveaux bénéficiaires. Seuls les travailleurs licenciés avant le 31 janvier 2025, y compris ceux qui prestent encore leur préavis, ainsi que ceux non licenciés mais travaillant au sein d’une entreprise ayant signé une déclaration d’intention de restructuration ou de licenciement collectif avant le 31 janvier 2025, pourront encore en bénéficier.
Flexibilisation des régimes de travail
De plus, diverses initiatives seront proposées afin de favoriser l’activation des travailleurs en leur offrant plus de flexibilité dans leur manière de travailler :
- Création d’un « crédit familial », fusionnant tous les congés parentaux et pouvant être utilisé par les deux parents, voire les grands-parents ;
- Levée de certaines restrictions sur le cumul des congés, notamment en ce qui concerne le congé maternité et l’exercice d’un mandat politique local ;
- Favorisation de la mobilité temporaire des travailleurs entre différents employeurs ;
- Mise en place d’horaires aménagés en concertation avec l’employeur, notamment en les alignant au rythme scolaire afin de mieux concilier la vie familiale et les obligations professionnelles ;
- Reconnaissance du travail effectué dans les transports pour les navetteurs (le « télé-train-vail ») sous réserve d’infrastructures adaptées, dont l’amélioration est promue par l’accord ; et
- Accroissement de la flexibilité dans l’accès à la formation, avec une collectivisation partielle des droits individuels.
Allègement des obligations administratives pour les employeurs
En outre, plusieurs mesures seront proposées d’ici le 30 juin 2025 dans le but de moderniser la gestion administrative et de réduire les contraintes pour l’employeur, parmi lesquelles :
- Suppression des obligations de premier emploi, facilitant ainsi l’embauche des jeunes travailleurs ;
Simplification des déclarations des données salariales et des heures de travail ; - Simplification des obligations administratives pour le travail à temps partiel, tout en garantissant le maintien de la protection des travailleurs ;
- Réduction des obligations reporting existantes ou nouvelles, en particulier pour les PME afin de limiter la surcharge administrative ;
- Limitation de la durée de conservation de certains documents ;
- Suppression de l’obligation de renouvellement semestriel obligatoire de certains accords, dont notamment la semaine de quatre jours, et remplacement par un accord à durée indéterminée avec un droit de rétractation semestriel ; et
- Assouplissement des obligations en matière d’évaluation des risques en entreprise, qui ne seront plus annuelles sauf en cas de modification des conditions de travail.
Remaniement des politiques de rémunération
L’accord de coalition montre également la volonté de réformer les politiques salariales afin de rendre la rémunération plus attractive et plus lisible, en favorisant une logique de rémunération directe plutôt que des avantages en nature.
Maintien des mécanismes d’indexation et de norme salariale
Tout d’abord, la coalition souhaite maintenir l’indexation automatique des salaires ainsi que la norme salariale, assurant ainsi le pouvoir d’achat des travailleurs et la compétitivité des entreprises belges face aux pays voisins.
Les partenaires sociaux disposent d’un délai allant jusqu’au 31 décembre 2026 pour soumettre une réforme globale du cadre salarial, intégrant à la fois les coûts de la main-d’œuvre et la compétitivité du marché belge.
Encadrement et simplification des avantages en nature
Dans ce contexte, la coalition souhaite privilégier la rémunération directe des travailleurs plutôt que les avantages en nature, en proposant notamment les mesures suivantes :
- Simplification et harmonisation des bonus collectifs (CCT 90, primes bénéficiaires…) sans augmentation des charges pour les employeurs et les travailleurs ;
- Extension des possibilités d’utilisation des chèques-repas pour les bénéficiaires ;
- Simplification des systèmes d’avantages par la suppression progressive de certains chèques (écochèques, chèques culture…) ;
- Exonération des cotisations sociales sur les options sur actions et les warrants ;
- Plafonnement des cotisations patronales à l’ONSS pour les salaires dépassant 250 000 EUR brut par an ; et
- Mise en place d’un cadre légal clair pour la rémunération flexible. Ainsi, l’octroi de warrants reste possible, mais moyennant une limite de 20 % du salaire brut annuel. De plus, les rémunérations flexibles ne pourront être supérieures à 20% du salaire fixe.
Conclusion
L’objectif de l’accord de coalition est clair : offrir un cadre plus flexible et efficace, sans compromettre les droits des travailleurs ni freiner la compétitivité des entreprises. Toutefois, la question demeure de savoir si ces assouplissements seront suffisants et adaptés pour garantir un équilibre entre les performances économiques et les conditions de travail. Si ces mesures permettent d’adapter le marché du travail aux réalités économiques contemporaines, elles doivent également assurer une protection suffisante aux deux parties de la relation de travail.
L’enjeu principal réside désormais dans la mise en œuvre concrète de ces réformes et dans leur réception par les travailleurs et les employeurs. L’impact réel de ces propositions dépendra grandement de leur application effective et des ajustements qui y seront apportés au fil du temps.
Pour toute question ou accompagnement concernant ces nouvelles mesures, n’hésitez pas à contacter un membre de l’équipe Employment & Benefits, nous serons ravis de vous aider.